LA
GUITARE DE MARC
Je vais vous parler des Shooting Colors.
La guitare, sur le tableau, une Gibson Heritage (pour les connaisseurs),
m'appartenait et avait rendu l'âme après m'avoir accompagnée
fidèlement. Pour qu'elle ne disparaisse pas, j'avais demandé à Arman
si jamais il ne voulait pas m'en faire "quelque-chose".
Il m'a répondu qu'il ne voulait plus faire des objets qui ressemblaient à ceux
qu'il avait fait plus tôt dans les années soixante.
Mais que je n'avais qu'à la laisser par là.
On verrait bien.
Durant plusieurs années, lorsque je revenais à Vence, la guitare,
dans sa boîte était toujours rangée dans l'atelier...
Un jour de 1989, il commence par faire deux essais d'objet sur panneau, une
mandoline et une paire de chaussures, recouverts de peinture.
L'idée des projections de couleurs lui était venu suite à la
série des "DIRTY PAINTINGS", (les tubes étaient jetés
en vrac sur un panneau, on montait dessus et on les piétinait avec
une joie enfantine), faut dire qu'il y en jaillissait partout de la couleur
dans l'atelier!
Des traces rectilignes sur un meuble avaient attiré son regard, il
m'avait dit, "t'as vu c'est pas mal..."
Quelques jours plus tard, je l'ai vu se diriger vers la guitare, la sortir
de sa boîte, me dire que c'était un bel instrument, la lever
au dessus de sa tête, la frapper violemment contre le sol de l'atelier,
recommencer, encore, la bourrer de coups de pieds, de coups de marteau, jusqu'à ce
que la guitare soit absolument convaincue de son sort.
Il me dira "c'est du solide, j'ai eu du mal à lui régler
son compte..."
Le regard amusé, il place ensuite les fragments sur un panneau, les
colle, pose le panneau par terre, choisit des couleurs, dispose les tubes à
même le sol et les presse violemment avec son pied droit.
-"TCHACK!"
La couleur fuse des tubes en une parfaite ligne, propulsant son archée
au dessus du tableau et retombe en laissant sa trace, et encore, et encore...
-"AH! MAIS!"
Il dit, après en avoir terminé.
-"C'est ta guitare, c'est la guitare de Marc..."
Quand je lui ai demandé comment lui était venu l'idée
de ces tableaux. Il m'a répondu qu'il les avait rêvé. "Je
visitais une exposition et je les ai vu, ces tableaux, je me suis dit, c'est
bon, qui est-ce qui a fait
ça?..."
Pour être sûr, il les a concrétisé avant qu'un
autre ne le fasse avant lui....
MARC'S GUITAR
I will tell you about the Shooting Colors.
The guitar on this painting, a Gibson Heritage (for the experts), belonged
to me and was finished after a long fidelity with me. To avoid its complete
end, I asked Arman if he would consider making something of it for me.
He replied he did not want to make any more objects resembling those
that he made earlier in the Sixties.
But I just had to leave it there and he'll see.
During several years, when I returned to Vence, the guitar, in its box was
always there, in the studio...
One day in 1989, he started by testing an idea on two objects fixed on panels,
a mandoline and a pair of shoes, both covered with painting.
The idea of paint projections came to him after the DIRTY PAINTINGS series,
(paint tubes were thrown randomly on the panel, we walked up on it and trampled
the tubes with a childish joy), needless to say that color spouted out everywhere
in the studio!
Linear traces on a piece of furniture attracted his eye and he said to me, "did
you see? not bad"
A few days later, he went to the guitar, took it from its box, and as he
was telling me what a beautiful instrument it was, he lift it up above his
head before violently striking it against the floor of the studio, repeated
the strikes, kicked it, hammered it, until the guitar was absolutely convinced
of its fate.
Later, he told me: "It was solid stuff, took me a lot of work to get
even with it!"
With an amused look, he then placed the fragments on a panel, glued them,
put the panel down, chose his colours, laid down the open tubes directly
on the floor before pressing them violently with his right foot.
- "TCHACK!"
The color shuts out of the tubes in a perfect line, propels its ark above
the panel and falls down while leaving its trace, again and again.
- "AH MAIS!" He finishes.
- "It is your guitar, it's called Marc's guitar"
When I asked him how the idea of this sort of paintings came up to him, he
replied that he had dreamed them: "I was at an exhibition and I saw
these paintings, I said to myself, this is good, who did that? "
So, to be safe, he materialized the paintings before someone else does it
before him.